Comment donner un bon feedback : l’arme secrète des meilleurs managers
26 juil. 2025
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Un compliment vague ou une critique maladroite peuvent faire plus de dégâts qu’on ne l’imagine. Dans un monde où les entreprises cherchent à allier performance et engagement, savoir donner un bon feedback n’est plus une “soft skill”, c’est une compétence critique. Pourtant, encore trop de managers s’y cassent les dents. Alors, comment s’y prendre pour que votre retour d’information transforme vraiment la performance, et les relations au travail ? Spoiler : ce n’est pas (seulement) une question de forme.
©Blify
Le feedback, parent pauvre du management
« J’ai l’impression de faire du bon boulot, mais je n’en suis pas sûr », confiait un manager lors d’un entretien utilisateur mené par Blify. Un mal répandu : selon une étude Gallup, seuls 26 % des salariés estiment que les retours qu’ils reçoivent les aident à mieux travailler. Pire, quand le feedback est absent ou mal formulé, il devient source d’anxiété, de démotivation… voire de désengagement durable.
À l’inverse, bien utilisé, le feedback est un levier puissant de progression. Il renforce l’autonomie, la confiance, et contribue à créer une culture de l’apprentissage permanent. Mais encore faut-il qu’il soit clair, utile, et entendu. Trois conditions rarement réunies quand le manager improvise sur le moment, sans méthode ni intention.
Pourquoi ça coince ? Un manque de méthode, pas de bonne volonté
Ce n’est pas une question de motivation. Blify l’a observé lors de ses interviews : les managers veulent bien faire, mais manquent de repères. Beaucoup redoutent la confrontation, d’autres pensent - à tort - qu’un bon feedback doit forcément être positif. Résultat : soit ils évitent, soit ils enrobent, soit ils balancent un message confus. Et dans tous les cas, le collaborateur repart avec plus de questions que de réponses.
Dans une étude menée par Josh Bersin, 40 Chief Learning Officers (CLO) de grands groupes ont confié que la majorité des formations dispensées sur le sujet ne suffisent pas à transformer les pratiques. Pourquoi ? Parce qu’elles restent trop théoriques, ou déconnectées du quotidien opérationnel des managers.
Le feedback efficace : une pratique ancrée dans le temps
Pour être vraiment impactant, le feedback ne doit pas être un événement ponctuel, mais un rituel intégré à la dynamique de l’équipe. C’est aussi ce que confirme la recherche sur la courbe de l’oubli : sans répétition ni mise en pratique, 90 % des informations sont oubliées une semaine après avoir été entendues (Ebbinghaus, 1885 ; Harvard Business Review, 2017).
L’apprentissage, pour être durable, doit donc se faire “in the flow of work”, selon l’expression popularisée par Josh Bersin : autrement dit, dans les moments où le feedback fait sens, sur des cas concrets vécus par le manager.
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Le framework SCIS : la structure qui change tout
Face à ce constat, plusieurs modèles ont vu le jour pour aider les managers à structurer leur feedback. L’un des plus simples et efficaces reste le SCIS, acronyme de :
Situation : poser le décor → « Lors de la réunion de mardi matin… »
Comportement : décrire un fait observable → « …tu as coupé plusieurs fois Paul en parlant. »
Impact : exprimer les conséquences concrètes → « …ça a freiné l’échange et Paul s’est refermé. »
Solution (facultatif mais recommandé) : ouvrir une piste d’ajustement → « Peut-être qu’on pourrait reformuler puis laisser chacun répondre ? »
Ce modèle présente deux avantages majeurs :
Il permet d’éviter les jugements (“tu es agressif”) au profit de faits et d’observations concrètes.
Il ancre le feedback dans une logique de progression, en formulant des alternatives.
Ce n’est pas un hasard si SCIS est aujourd’hui utilisé dans de nombreux programmes de formation en entreprise, de la banque à la tech. Il est aussi plébiscité dans les environnements hybrides, où la clarté et la concision du message deviennent critiques.
Le feedback, un outil de culture (pas juste de performance)
Donner un bon feedback, ce n’est pas seulement corriger ou féliciter. C’est cultiver, à petite dose mais régulièrement, une forme d’exigence partagée. C’est créer les conditions d’une sécurité psychologique où chacun peut dire, entendre, s’ajuster.
D’ailleurs, les entreprises les plus performantes ne laissent pas le feedback au hasard. Chez Pixar, par exemple, chaque projet est suivi de séances de “braintrust”, où les équipes s’exercent à donner un retour franc mais bienveillant, centré sur l’amélioration. Même logique chez Netflix, qui valorise un feedback radical mais toujours tourné vers la réussite collective.
En France, cette culture peine encore à s’imposer. Les équipes Blify l’ont bien vu lors de leurs entretiens : dans certaines entreprises, le feedback n’existe tout simplement pas. D’où la nécessité de former, mais aussi d’incarner. Le manager ne peut pas exiger ce qu’il ne pratique pas.
Les 5 erreurs les plus courantes
Sans sombrer dans la caricature, voici ce que les équipes de Blify ont régulièrement observé sur le terrain :
Feedback sandwich trop sucré : on glisse une critique entre deux compliments, au point de diluer le message.
Jugements de valeur : « tu es toujours comme ça », « tu ne comprends jamais ». Ces formulations créent de la défense, pas de l’ouverture.
Absence d’exemples : sans faits concrets, le feedback reste abstrait.
Timing raté : un retour formulé à chaud dans l’émotion ou des semaines plus tard perd son impact.
Monologue : un bon feedback est un dialogue. Il s’écoute autant qu’il se dit.
Vers une nouvelle génération de managers coachs
Avec l’évolution des attentes (quête de sens, besoin de reconnaissance, envie d’autonomie), le rôle du manager évolue. Il n’est plus seulement un relais de l’information ou un évaluateur, mais un coach au quotidien. Cela suppose d’adopter une posture d’écoute, d’observation et de régulation continue.
Donner un bon feedback devient alors un acte de leadership, pas juste un exercice de communication. C’est ce que montre également la recherche menée par Deloitte sur les entreprises à haute performance humaine : le feedback régulier y est l’un des 5 rituels managériaux les plus structurants.
Conclusion : il n’y a pas de bon feedback sans intention
Le bon feedback ne tombe pas du ciel. Il se prépare, se pense, s’adapte. Il s’ancre dans une culture du travail exigeante et bienveillante. Il se répète, se renforce, se transmet. Et surtout, il s’apprend.
Alors, que vous soyez RH, responsable L&D ou manager de proximité, posez-vous la question : dans votre entreprise, le feedback est-il un outil ? Une habitude ? Ou juste un mot vide ?
À vous de jouer. Et si on s’entraînait ensemble ?
Auteur(s)

Clément Lhommeau
Cofondateur, Blify
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